jeudi 31 juillet 2025

Prosper Mérimée | Laszlo Barta (illustrateur) | Carmen. Illustrations de Barta. Editions de la Cigogne. Paris, 1942 | Tirage unique à 215 exemplaires. Exemplaire enrichi de 2 gouaches originales au format du livre (32 x 25 cm) signées par l'artiste. Très bel exemplaire.


Prosper Mérimée | Laszlo Barta (illustrateur)

Carmen. Illustrations de Barta.

Editions de la Cigogne. Paris, 1942

1 volume in-folio (33 x 26 cm), en feuilles couverture illustrée rempliée, 160 pages. Avec 41 gouaches originales dans le texte et hors-texte reproduites à l'identique par Edmond Vairel. Emboîtage éditeur.

Tirage unique à 215 exemplaires.

Celui-ci, un des 177 exemplaires sur vélin de Rives (n°115).

Avec 23 ex. sur Japon nacré et 15 ex. de collaborateurs.

Les 41 gouaches originales de Barta ont été reproduites par Edmond Vairel, enlumineur d'art à Paris. Le texte composé en Garamont corps 24 a été imprimé sur les presses de Pierre Bricage à Paris. Achevé d'imprimer le 10 février 1942.

Exemplaire enrichi de 2 gouaches originales au format du livre (32 x 25 cm) signées par l'artiste. L'une des deux gouaches (le bohémien joueur de guitare) est insolée en marges (brunissement). L'autre gouache, en parfait état, représente l'attaque d'une diligence par les brigands.


Le Carmen de Prosper Mérimée, nouvelle publiée en 1847, est un récit bref et intense qui mêle exotisme, passion et tragédie. Inspirée par un voyage en Espagne et enrichie de recherches ethnographiques, l’œuvre suit un narrateur français qui rencontre Don José, un ancien soldat devenu brigand par amour pour la belle et insaisissable bohémienne Carmen. Mérimée mêle récit cadre et récit enchâssé, donnant la parole à Don José, dont la déchéance progressive est racontée avec sobriété. Carmen incarne la liberté, la séduction et le fatalisme : elle aime selon son bon plaisir et refuse toute attache, ce qui précipite sa mort. Don José, consumé par une passion jalouse, la tue dans un accès de rage désespérée. À travers cette histoire, Mérimée explore les tensions entre civilisation et instinct, entre norme sociale et désir. Il dresse aussi un tableau critique de l’exotisme romantique, tout en offrant une réflexion sur la fatalité amoureuse. La nouvelle, brève mais dense, se distingue par son style sec, son efficacité narrative et son regard lucide sur les passions humaines.

Laszlo Barta était peintre et mosaïste, et artisan relieur et décorateur de ses propres reliures. Il est né en 1902 à Nagykoros en Hongrie et s'est fixé en France en 1926. Naturalisé français, il est mort en 1961. Il a conçu des décors et illustré plusieurs livres (Carmen, Gargantua, Femmes de Verlaine, Villon, etc.) pour bibliophiles. Bénézit indique d'après le témoignage de la veuve de l'artiste : « vu les circonstances après 1932 [...], il [L. Barta] avait jugé prudent, avec l'accord de son éditeur et vu sa situation d'apatride : Hongrois et Israélite, de substituer à son vrai nom le pseudonyme de Brutus, dès lors qu'il s'agissait d'ouvrages un peu spéciaux - érotiques - ornés pour la plupart de gouaches originales. » Laszlo Barta s'est également essayé à l'eau-forte pour illustrer quelques ouvrages de bibliophilie tel que celui que nous présentons.








Montparnasse fut pour Barta le lieu de rencontre avec les peintres fauves comme Matisse et Dufy, dont il apprendra à maîtriser le placement des couleurs. Il se liera également d'amitié avec Gleizes, entre autres. Son parcours artistique évolue d'un style expressionniste inspiré du fauvisme, traverse le cubisme et aboutit, à la fin de sa vie, à l'abstraction. Il s'établit vers 1950 à Saint-Tropez et sa maison devient le lieu de rencontre des artistes. La galerie Julien Levy à New-York exposera en permanence ses oeuvres aux côtés de celles de Dufy, Braque et Picasso.

Jacques Klein a vu le jour le 16 juillet 1897 à Szamosujvar, une petite ville proche de Dej dans la Transylvanie de l'empire austro-hongrois (actuelle Hongrie). En tant que quatrième enfant d'une famille juive modeste, il apprend la gravure en autodidacte. En 1919, il décide de se joindre aux révolutionnaires dirigés par Bela Kun, suivant ainsi ses idéaux. Après l'échec et la répression de cette révolution, il est arrêté et doit s'exiler. En 1924, il choisit de s'installer en France, où il fréquente le milieu des réfugiés hongrois et fait la connaissance de divers artistes à Montmartre, notamment le peintre Lazlo Barta, qui illustrera par la suite plusieurs de ses livres. Il fait également la rencontre du graveur en taille douce Edmond Rigal, qui réside à Fontenay aux Roses, et y établit sa maison d'édition (19, rue Guérard), fondant les Editions de la Cigogne, "entreprise spécialisée dans la création et la vente de livres illustrés". En 1932, il publie son premier livre illustré, des poèmes de Villon avec des illustrations de Barta, suivi de plusieurs autres ouvrages, dont "Lysistrata" d'Aristophane, "Gargantua" de Rabelais en 1934, "le Cantique des cantiques" en 1936, puis "Inferno" de Dante en 1938, publié en italien pour garantir une fidélité totale au texte. La seconde guerre mondiale se profilant, l'horizon de l'Europe s'assombrit progressivement. Face à l'accélération des événements, Jacques Klein réussit à rejoindre la zone non occupée et à embarquer à Bayonne avec sa fiancée. Le couple débarque à Casablanca, au Maroc, le 6 juillet 1940, où Jacques Klein épouse Henriette Le Layec le 30 juillet. Les Editions de la Cigogne poursuivent leur activité au Maroc. La parution des nouveaux livres qui seront publiés au fil des années s'effectue grâce à des échanges réguliers avec Edmond Rigal et son fils Jacques, l'imprimeur Pierre Bricage, ainsi que les clients bibliophiles et d'autres artistes et illustrateurs que Jacques Klein a identifiés. Parmi eux se trouvent le peintre Albert Marquet, qu'il sollicite pour représenter les paysages et côtes algériennes dans "les Sites et Mirages" (texte de Henri Bosco), et Albert Gleizes, qu'il considère comme le mieux placé pour illustrer les "Pensées" de Pascal. Ce dernier ouvrage sera exposé et salué lors de la biennale de Venise en 1950. Dans chacune de ses initiatives, Jacques Klein s'efforce de maintenir une cohérence entre les textes et leurs illustrations. Encore en pleine activité, il décède le 1er janvier 1955, moins de deux ans après la mort d’Albert Gleizes. À son décès, Jacques Klein est reconnu par de nombreux journaux d'art de son temps comme un grand éditeur, un professionnel exigeant qui n'a jamais compromis sa vision élevée du livre d'art.






Gouache originale


Gouache originale

Très bel exemplaire enrichi de 2 belles gouaches originales inédites.

Prix : 1 450 euros

mercredi 30 juillet 2025

BARON (Michel BOYRON dit) | Les Œuvres de Monsieur Le Baron. Suivant la Copie. A Paris, chez Thomas Guillain, 1694 | 4 pièces de théâtre reliés en 1 volume in-12 | Reliure plein maroquin rouge signé DAVID. Superbe exemplaire. Contient : Le Rendez-vous des Thuileries ou le Coquet trompé, comédie. Les Enlèvemens, comédie. L'Homme à Bonne Fortune, comédie. La Coquette, et la fausse Prude, comédie.


BARON (Michel BOYRON dit)

Les Œuvres de Monsieur Le Baron.

Suivant la Copie. A Paris, chez Thomas Guillain, 1694

4 pièces de théâtre reliés en 1 volume in-12. Les 4 pièces ci-dessous ont été réunis en un seul volume avec un titre général et 4 titres particuliers, le tout en pagination continue :

Le Rendez-vous des Thuileries ou le Coquet trompé, comédie.

Suivant la Copie. A Paris, chez Thomas Guillain, 1694

Les Enlèvemens, comédie.

Suivant la Copie. A Paris, chez Thomas Guillain, 1694

L'Homme à Bonne Fortune, comédie.

Suivant la Copie. A Paris, chez Thomas Guillain, 1694

La Coquette, et la fausse Prude, comédie.

Suivant la Copie. A Paris, chez Thomas Guillain, 1694

(6)-362 pages. Frontispice gravé à l'eau-forte.

Reliure plein maroquin rouge signé DAVID (exécutée vers 1865-1880), dos richement orné aux petits fers, triple filet doré en encadrement des plats, large dentelle dorée en encadrement intérieur des plats, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées sur marbrure. Reliure parfaitement conservée. Intérieur très frais (exemplaire lavé au moment de la reliure comme presque toujours à cette époque). Superbe exemplaire très bien conservé. Quelques légères ombres et petites taches sombres au maroquin, absolument sans conséquence sur l'esthétique de l'exemplaire.



Contrefaçon hollandaise peu commune de l'édition parisienne parue la même année 1694 et qui réunit 4 pièces de l'auteur.

Le théâtre complet de Baron ne parut qu'après sa mort, en 1742 en 2 volumes in-12 puis en 1759 en 3 volumes in-12.















Michel Boyron dit Baron (1653-1729), grand comédien et dramaturge français, fut l’élève de Molière avant de devenir son partenaire de scène et, selon certains témoignages, son amant passionné. Considéré comme le plus grand acteur de sa génération, il interpréta les œuvres majeures du règne de Louis XIV, de Corneille à Racine, excellant tant dans le comique que dans le tragique. Auteur de dix comédies en prose ou en vers, dont la plus célèbre, L’Homme à bonne fortune, fut jouée jusqu’au milieu du XIXᵉ siècle, il marqua profondément l’histoire théâtrale. Retiré en 1691 après une carrière triomphale, il fit un retour sensationnel en 1720, à près de soixante-dix ans, poursuivant jusqu’à sa mort en 1729 une seconde carrière sur la scène du Palais-Royal. Il fut le père d’une dynastie de comédiens et la figure centrale d’un pan essentiel du théâtre classique français.

Superbe exemplaire parfaitement établi par David au milieu du XIXe siècle.

Bijou bibliophilique.

Prix : 1 250 euros

mardi 29 juillet 2025

[GOUAZÉ, Jean-Auguste ou Augustin] Traité sur l'époque de la fin du monde et sur les circonstances qui l'accompagneront. Par un Solitaire. Versailles, de l'imprimerie de J.-A. Lebel, 1814. 1 volume in-8 relié pleine basane d'époque. Bel exemplaire de ce livre rare traitant de manière convaincue de la fin du monde, entre mystique exaltée et eschatologie raisonnée.


[GOUAZÉ, Jean-Auguste ou Augustin]

Traité sur l'époque de la fin du monde et sur les circonstances qui l'accompagneront. Par un Solitaire [Jean-Auguste ou Augustin Gouazé].

Versailles, de l'imprimerie de J.-A. Lebel, 1814

1 volume in-8 (20,7 x 13,5 cm) de VI-352 pages.

Reliure pleine basane fauve racinée de l'époque, dos lisse orné, pièce de titre de maroquin rouge, tranches marbrées, doublures et gardes de papier marbré. Reliure décorative et solide malgré quelques légères marques et usures (coins, légères épidermures sur les plats). Intérieur assez frais.



Edition originale rare.

D'après une notice ce volume n'aurait été imprimée qu'à 250 exemplaires.

Il est annoncé dans la Bibliographie de la France du 25 juin 1814. Imprimé à petit nombre à Versailles il a été diffusé par plusieurs libraires de Paris (chez Le Normant, Pillet, Brunot-Labbe et Audot) et de province (à Toulouse chez Manavit, chez Mlle Glaçon, imprimeur-libraire ; à Rennes chez Mlle Blouet libraire).

Les exemplaires de ce livre sont aujourd'hui devenus quasiment introuvables.



L'abbé Auguste Gouazé est né à Toulouse en 1758. "Ses premières années, dès sa plus tendre enfance, furent données à la religion et à l'étude. Il chercha dans le ministère sacré du sacerdoce, un asile contre les tempêtes du monde ; mais il ne l'y trouva pas longtemps. Lui aussi eut à lutter, durant notre révolution, contre les violences que l'ennemi des hommes exerça envers les ministres de nos autels. [...] Il fut réellement un solitaire ; car il ne se montra nulle part là où l'ambition ou le plaisir rassemblent tous les hommes. Les pauvres, les affligés parvinrent seuls jusqu'à lui ; il ne les renvoya jamais sans avoir donné des secours ou des consolations. [...] Il termina ses jours le 30 novembre 1812 à l'âge de 54 ans. [...] On dit que le principal motif des chagrins qui lui donnèrent la mort, provenait des persécutions injustes dont l'aveuglement de l'empereur Napoléon accablait le souverain pontife. Gouazé est l'auteur d'un ouvrage très curieux, intitulé : Traité sur la fin du monde et sur les circonstances qui l'accompagneront, par un solitaire, un volume in-8, imprimé à Versailles, chez Le Bel en 1814. L'éditeur de ce volume, qui ne parut qu'après la mort de l'auteur, annonça qu'il cédait, en le publiant, à la volonté de Gouazé. Celui-ci sans avoir voulu commenter l'Apocalypse, a cherché, en s'appuyant sur ce livre mystérieux, à deviner l'époque à laquelle doit arriver ce dernier jour de l'univers annoncé dans les saintes Ecritures. [...] Il y a dans ce traité je ne sais quoi de sombre, de mélancolique, et en même temps de religieux, qui jette l'âme dans un salutaire effroi [...] Selon Gouazé, le monde à peine doit avoir deux cents ans d'existence [...] (in Biographie Toulousaine, 1823)










Dans la préface pour la Consommation des Siècles publiée en 1823 on lit : "Son travail manuscrit fut connu avant sa mort de quelques personnes de confiance, sous le titre de Conjectures sur la fin du monde" (1812).

La publication posthume seulement en 1814 donna lieu à la publication de deux articles dans le Journal Ecclésiastique, se prononçant contre ce traité. Pourtant, ces deux premiers articles ayant été jugés très sévères, un troisième article fut publié qui lui rendait justice dans ses analyses eschatologiques.

Gouazé dénonce un monde dépravé et impie, des chrétiens lâches et paresseux que la seule idée de la fin du monde révolte. Il détaille les signes annonciateurs du jour dernier. Il a suivi les traces d'autres annonciateurs de la fin du monde tels que Lachetardie, Pastorini, Rondet, etc. L'arrivée de l'Antéchrist était alors une préoccupation importante au sein de divers groupes de penseurs et religieux exaltés par une révolution qui les avaient laissés ahuris par tant de violence et de pertes.

"[...] L’Antéchrist, outre son faux prophète, aura encore une foule d’imposteurs et de suppôts de Satan, qui combattront pour lui contre Jésus-Christ et son Église. Il s’élèvera de faux christs et de faux prophètes, qui feront de grands prodiges et des choses merveilleuses. C’est Jésus-Christ qui nous le dit : et voici ce qu’il nous fait connaître encore par l’organe de saint Paul : Il viendra armé de toute la puissance et de l’opération de Satan, pour faire des choses merveilleuses et de faux prodiges. Saint Jean nous dit la même chose, en parlant du faux prophète et de la bête : Il fit de grands prodiges. Il est donc assuré que l’Antéchrist, son faux prophète, et les autres faux prophètes qui alors s’élèveront en foule, feront des choses extraordinaires qui ressembleront à des miracles, et qui rendront la séduction très dangereuse pour des hommes grossiers et ignorants. Le démon leur communiquera toute sa puissance, pour opérer de faux prodiges que les hommes corrompus et peu instruits prendront pour de vrais miracles ; et ils se jetteront en foule dans le parti de ces imposteurs. Ce ne seront pas sans doute de vrais miracles ; Dieu seul peut en opérer, et en donner le pouvoir à ses serviteurs ; mais il y a des œuvres qui surpassent les forces de la nature humaine, et qui ne surpassent pas le pouvoir du démon, lorsque Dieu lui permet d’en user. Tels seront les prodiges qu’opérera alors l’Antéchrist. [...]" (extrait du chapitre XXX)









Selon Gouazé la fin du monde était pour l'année 1940. Il marque le début de l'apocalypse en l'année 1790. "Les jours malheureux que nous voyons s'écouler depuis vingt-deux ans (il écrit en 1812), nous avertissent que le temps de la consommation de toutes choses s'approche ... et nous savons que, d'ici à cette époque, nos maux iront toujours croissant ; s'il y a quelques intervalles, quelques moments de paix et de tranquillité, ils ne seront pas toujours de longue durée." (extrait).

L'histoire de l'abbé Gouazé serait trop longue à détailler ici mais elle montre un prêtre fils de professeur de la faculté de droit de Toulouse qui fut placé à la tête du conseil de paroisse qui appartenait à Seysses. Gouazé fut arrêté pour avoir refusé de prêter serment à la nouvelle constitution française. Condamné à la déportation dans les premiers mois de 1794 il fit partie d'un convoi de 56 prêtres qui partit pour la maison d'arrêt de Bordeaux (22 nivôse an II) et devait attendre leur embarquement pour la Guyane. Mais il fut finalement libéré en juillet 1795 pour revenir exercer son ministère à Seysses le 21 septembre de l'an III. Il vécut sa captivité dans des conditions déplorables comme l'indique l'abbé Contrasty dans son ouvrage intitulé : Un Conseil de Paroisse sous le régime de la séparation de l'église et de l'état (Toulouse, imprimerie Saint-Cyprien, 1906, pp. 81 et suiv.).

Voici la liste de quelques chapitres : le monde doit périr par le feu - le monde doit durer environ 6000 ans - les hommes seront surpris par l'arrivée du dernier jour, comme ils le furent autrefois par les eaux du déluge - quatrièmre signe : une guerre universelle - la venue de l'Antéchrist - quel sera le nom de l'Antéchrist - de l'approche du jugement dernier - etc.

Références : Brunet, Fous littéraires, p. 91 ; Tcherpakoff, p. 42 (pour l'édition de 1814)


Bel exemplaire en condition d'époque de ce livre devenu introuvable traitant de manière convaincue de la fin du monde, entre mystique exaltée et eschatologie raisonnée.

Prix : 650 euros