lundi 15 septembre 2025

Hippolyte FAUCHE (éditeur traducteur) | [KRICHNA | KRISHNA | KRSNA] [HINDOUISME | HINDUISM] LE GITA-GOVINDA ET LE RITOU-SANHARA, traduits du sanscrit en français pour la première fois, par Hippolyte Fauche. Paris, chez tous les libraires assortis en ouvrages de littérature orientale, 1850 [imprimé à Meaux - Imprimerie A. Carro]. 1 volume petit in-8. Reliure plein veau glacé caramel, dos à nerfs, fer spécial "Ganesha". Edition originale rare. Bel exemplaire.



Hippolyte FAUCHE (éditeur traducteur) | [KRICHNA | KRISHNA | KRSNA] [HINDOUISME | HINDUISM]

LE GITA-GOVINDA ET LE RITOU-SANHARA, traduits du sanscrit en français pour la première fois, par Hippolyte Fauche.

Paris, chez tous les libraires assortis en ouvrages de littérature orientale, 1850 [imprimé à Meaux - Imprimerie A. Carro].

1 volume petit in-8 (19,7 x 13 cm) de (4)-IX-200-(1) pages. Bien complet du feuillet d'errata à la fin.

Reliure plein veau glacé caramel, dos à nerfs, fer spécial "Ganesha" doré au centre du premier plat (voir photo). Reliure très bien conservée, quelques marques et traces sans gravité. Intérieur frais avec quelques rousseurs claires. Imprimé sur bon papier vélin blanc (papier fort). Reliure exécutée probablement dans les premières années du XXe siècle.

Edition originale rare.












"Govinda signifie celui qui fait obtenir le ciel ; c’est un des noms si nombreux donnés à Krishna, la dernière et la plus belle incarnation de Vishnou ; car, dans les autres, disent les poëtes, ce Dieu n’avait incarné qu’une portion de son ineffable substance, mais, dans celle-ci, était Vishnou tout entier. Gîta veut dire chant. Le Gîta-Govinda est donc une ode, dans la première acception du mot grec, ou plutôt c’est un drame lyrique en l’honneur de Govinda. Ce que l’on sait de certain sur Jayadéva, l’auteur de cette œuvre, où se distille une volupté si brûlante dans une idée mystique, se borne à peu près au nom de son épouse Padmâvatî. Peut-être son père se nommait-il Baudjadéva ; peut-être sa mère s’appelait-elle Râmâdevî. Le dernier sloka du poëme nous l’assure ; mais, évidemment, cette stance fut mise après lui, d’une autre main. La même incertitude règne sur le temps où il a pu vivre, qui d’ailleurs ne semble pas très-ancien, et sur le pays, où, pour la première fois, il a respiré l’air natal. Le poëte même nous dit qu’il sortait de Kindoulîva. Est-ce le nom d’une famille ? Est-ce le nom d’une ville ? Et, dans ce cas, où la trouve-t-on ? Ces questions ne sont pas résolues. Quoi qu’il en soit, trois villes, nommées Kéndoulî ou Kendôlî, mot contracté de Kindoulîva, se disputent la gloire de sa naissance ; et l’une d’elles, située dans le Burdwan, célèbre tous les ans un festival en l’honneur de Jayadéva, et passe toute la nuit à chanter, danser et jouer son drame lyrique. Ce poëme est un de ceux, et l’on peut dire même le plus beau de tous ceux, que les Bayadères ont coutume de représenter dans les fêtes religieuses. Le drame n’a que trois personnages : une confidente, Krishna et Râdhâ, la charmante gopi, mot harmonieux, mais dont l’équivalent (littéralement, gardeuse de vaches) ne trouve pas chez nous, pour s’ennoblir, ces idées saintes, que la religion drape autour de la vache et du taureau dans les champs fleuris de l’Indus et du Gange. Quelquefois Jayadéva prend aussi la parole, afin de remplir un intervalle ou d’établir une transition dans un changement de scène ; mais, alors, il est rare que son rôle dépasse un sloka, c’est-à-dire, une stance. Chacune des sections ou chants du poëme est terminée par une bénédiction, peut-être afin de ramener au mysticisme de l’esprit un lecteur près de s’égarer dans l’érotisme de la lettre : mais, ce qui n’est pas moins remarquable, c’est que toutes les cantilènes, semées dans le corps de l’ouvrage, finissent aussi par un vœu ou par un éloge, quelquefois enthousiaste, à la gloire de Jayadéva ; ce qui répugne aux apparences de modestie que nos idées littéraires exigent d’un auteur en face du public, son puissant et dédaigneux seigneur. Le sujet littéral du poëme, ce sont les amours de Krishna et de Râdhâ ; l’inconstance de l’amant, qui promène de belle en belle un goût passager ; son repentir et la réconciliation du volage avec sa nompareille amante. Mais le sujet anagogique, c’est l’âme, dont Krishna est ici le symbole, et qui, entraînée par les sens vers les objets extérieurs, où elle trouve un instant du plaisir, est changée par un seul regard de la grâce efficiente et ramenée à l’amour de la beauté divine, sous le type de Râdhâ. Ce poëme ressemble donc pour les moyens et le but au Cantique des cantiques, où le mystique hymen de Jésus-Christ avec son église est figuré allégoriquement par les amours du roi Salomon avec sa belle Sulamite ; et, ce qui achève la ressemblance, le Gîta-Govinda a besoin, comme le Cantique des cantiques, que la chasteté du lecteur veuille bien prendre la peine de mettre elle-même de temps en temps le voile de l’intention religieuse sur le nu trop voluptueux de la séduisante Galathée, dont le Pygmalion indien présente à nos yeux l’enivrante statue. Maintenant il nous reste à faire ce qu’il y a de plus difficile, parler de la traduction et par conséquent de soi-même. Oserons-nous répéter « qu’elle est d’une grande fidélité et d’un excellent goût de traduction » ? ou devons-nous attribuer seulement une simple valeur de politesse à ces paroles échappées à la bienveillance de l’homme célèbre, dont nous avons été le disciple assidu pendant six ou sept années, et qui occupe avec tant d’honneur la chaire de Sanscrit au Collège de France ? Quant à la fidélité, nous confessons ingénument que nous l’avons poursuivie jusqu’à la témérité dans la stance 47ᵉ du II chant, les slokas numérotés 12 des V et XII chants, le 15ᵉ et surtout le 2ᵉ du chant dernier. Nous avons pensé qu’il en est du traducteur comme de l’archéologue. Quand celui-ci découvre dans les ruines du passé une de ces antiques statues, où la sculpture symbolique a voulu exprimer sous une forme humaine la Nature typifiée dans son énergie virile et fécondante, il expose le monument tel qu’on l’a trouvé, sans mutiler ni déguiser l’organe où réside ce que l’emblème a de plus caractéristique. Toutes les fois qu’on a cru possible de traduire vers pour vers, on n’a point négligé de l’essayer, et l’on a marqué ces coupes dans la présente édition avec ce trait de filet — au commencement soit du vers, soit du refrain. Nous avons imprimé en italique les mots que nous avons dû prêter au texte, soit pour éclaircir un passage obscur, soit pour soutenir une expression, qui n’avait pas dans notre langue autant de noblesse, de grâce ou d’exactitude. Supprimez-les mentalement, et le texte, réduit à lui-même, vous restera mot à mot. Mais nous avons jugé superflu que la traduction marchât avec un grand bagage de notes : elles sont inutiles pour quelques-uns ; peut-être, seront-elles pour d’autres un peu insuffisantes, quoique les traductions déjà assez nombreuses de poëmes sanscrits, dont notre littérature s’est enrichie depuis quelques années, aient dû apprendre à tout le monde que les Sorras sont les Dieux et les Asouras au contraire les Démons, que l’amour indien s’appelle Kâma, qu’il porte en son carquois cinq flèches seulement, nombre égal à celui de nos sens, qu’au lieu de fer elles ont des fleurs, et que, sous les noms de Vaïcountha, Nârâyana, Hari, Dâmaudara, Moukounda, Bagavat, il faut comprendre ici une seule et même individualité suprême, Krishna, identique à Vishnou et considéré sous différents aspects mythologiques." (Introduction)

Le Gîta-Govinda, ce « chant en l’honneur de Govinda », figure parmi les joyaux de la poésie sanskrite. « Govinda », littéralement « celui qui fait obtenir le ciel », est l’un des noms de Krishna dans son incarnation la plus accomplie de Vishnou ; « Gîta » signifie « chant ». L’œuvre se présente comme un drame lyrique où la ferveur mystique se fond dans une volupté ardente. Son auteur, Jayadéva, poète du XIIᵉ siècle, vécut à la cour du roi Lakshmana Sena (1178–1206) dans l’Inde orientale. Si sa biographie demeure incertaine — plusieurs villes se disputent sa naissance, et l’on ne connaît guère que le nom de son épouse Padmâvatî — son poème eut un retentissement immédiat. Dès le Moyen Âge indien, il fut chanté dans les temples de Jagannath à Puri et dansé par les bayadères au service du culte. Chaque année encore, le Bengale et l’Orissa lui consacrent des fêtes nocturnes. Le drame n’aligne que trois personnages : Krishna, Râdhâ et une confidente. Mais ce trio suffit à peindre toute l’intensité de l’amour humain et divin : inconstance du dieu-amant, jalousie et douleur de Râdhâ, repentir et réconciliation finale. À la lecture littérale, ce sont des amours passionnées ; à la lecture symbolique, c’est l’âme humaine, séduite par les sens, qui revient à la Beauté suprême sous le regard de la grâce divine. D’où la comparaison traditionnelle avec le Cantique des Cantiques. La traduction d’Hippolyte Fauche (milieu du XIXᵉ siècle), élève de Burnouf, restitue ce poème avec une fidélité scrupuleuse, parfois jusqu’à la « témérité ». Refusant de mutiler le texte, il le rend vers pour vers, et n’ajoute en italique que quelques mots pour soutenir ou éclairer le sens. Peu de notes, mais une traduction limpide, où le lecteur français du Second Empire peut percevoir à la fois l’élan mystique et la grâce voluptueuse de Jayadéva. Par son lyrisme enivrant, le Gîta-Govinda a traversé les siècles comme un hymne universel à l’union de l’âme et du divin. À la frontière du sacré et de l’érotique, il demeure un texte fondateur de la spiritualité bhakti et une révélation pour l’Orientalisme européen.

Les pages 109 à 180 contiennent le Ritou-Sanhara. "Le mot ritu, qu’il faut prononcer ritou, veut dire saison ; et c’est de lui, qu’est venu le ritus des Latins ; car, dans le sens donné, il paraît n’être qu’une métonymie prise des cérémonies religieuses ou des rites observés à l’ouverture de chaque saison. San­hâra signifie collection, assemblage de choses réunies. Le Ritou-Sanhâra est donc un poëme encyclopédique des saisons ; et la carrière, où sont entrés dans le siècle dernier Thompson, Saint-Lambert, Roucher, fut parcourue seize ou dix-sept siècles avant eux par l’indien Kâlidâsa. Il vécut sous le règne de Vikramaditya, qui, à peu près contemporain d’Auguste, fonda comme lui une ère (1) célèbre dans l’Inde, qui aima comme lui et protégea les arts, qui compta comme lui parmi les ornements de sa cour neuf poëtes, appelés d’une magnifique expression LES NEUF JOYAUX DU ROI. Le plus riche fleuron de cette brillante couronne était Kâlidâsa, que son drame charmant de Sakountala, ce beau chef-d’œuvre de la scène indienne, mis en français par Bruguière sur la traduction anglaise de Jones et par Chézy sur le texte sanscrit, a déjà fait connaître chez nous presque à l'égal de Shakespeare, de Goëthe et de Schiller. [...]" (extrait de l'introduction).







A le fin du volume (pages 181 à 198) se trouve des extraits du Rig-Véda. le plus ancien et le plus important des quatre Védas, les textes sacrés de l’Inde ancienne qui constituent la base de l’hindouisme.​ Rédigé en sanskrit védique, il est daté entre -1500 et -1200 av. J.-C. (selon la chronologie généralement admise par les chercheurs). C’est l’un des plus vieux textes religieux connus au monde transmis de manière continue. Le Rig-Véda est une collection de 1 028 hymnes (sūkta), regroupés en 10 livres (mandala). Ces hymnes étaient chantés ou récités lors de rituels sacrificiels. Le Rig-Véda est à l’Inde ce que l’Iliade et l’Odyssée sont à la Grèce, mais avec une dimension religieuse encore plus marquée : un monument fondateur qui mêle poésie, rituel et spéculation métaphysique. Fauche ne doit ici de ce texte que quelques courts extraits.

Bel exemplaire de cette rare édition originale française, probablement tirée à petit nombre, ici reliée avec un fer spécial Ganesha (élément des plus rares dans le domaine de la bibliophilie indianiste européenne).

Prix : 950 euros