lundi 16 juin 2025

Roger de Rabutin dit Bussy-Rabutin | Lettres et Nouvelles Lettres (1720-1727). Rare édition de 1720-1727 parue à Paris chez Florentin Delaulne (4 volumes) et sa Veuve (3 volumes). Ensemble complet en 7 volumes reliés à l'époque. Une des plus intéressantes correspondances privées couvrant la première partie du règne de Louis XIV (de 1666 à 1692).


BUSSY-RABUTIN, [Roger de Rabutin, comte de Bussy, dit]


LES LETTRES DE MESSIRE ROGER DE RABUTIN, COMTE DE BUSSY, Lieutenant Général des Armées du Roi, et Mestre de Camp Général de la Cavalerie française et étrangère. Nouvelle édition. [Première-Quatrième partie].

A Paris, chez Florentin Delaulne, 1720

4 volumes

Suivi de :

NOUVELLES LETTRES DE MESSIRE ROGER DE RABUTIN, COMTE DE BUSSY, Lieutenant Général des Armées du Roi, et Mestre de Camp Général de la Cavalerie française et étrangère. Avec les réponses.

A Paris, chez la Veuve Delaulne, 1727

3 volumes

Ensemble de 7 volumes in-12 (15,8 x 9,5 cm) de (4)-374-(2), (4)-295, (6)-550, (8)-491-(4), (10)-448, (8)-386 et (8)-384 pages. Collationné complet.

Reliure plein veau brun de l'époque, dos à nerfs richement ornés, pièces de titre et tomaison de maroquin rouge, tranches rouges. Quelques coins avec usures. Quelques mouillures sans gravité. Quelques rousseurs. Pourtour de quelques pages de titre bruni. Manque la première garde blanche dans le deuxième volume.

Rare édition de 1720-1727 parue à Paris chez Delaulne.














Détail des volumes : Tome I : Outre un Avertissement, ce volume contient les lettres I à CXLIV. Soit 144 lettres. Tome II : Ce volume contient les lettres I à CXI. Soit 111 lettres. Tome III : Ce volume contient les lettres I à CCCXXXIII. Soit 333 lettres. Tome IV : Ce volume contient les lettres I à CCCLXXI. Soit 371 lettres. Tome V : Outre un Avertissement, ce volume contient les lettres I à CCCXXV. Soit 325 lettres. Tome VI : Ce volume contient les lettres I à CCLXX. Soit 270 lettres. Tome VII : Ce volume contient les lettres I à CCXIX. Soit 219 lettres. Sur l'ensemble des 7 volumes ce sont donc 1773 lettres écrites par le comte de Bussy-Rabutin ou adressées à lui qui sont rassemblées dans cette édition, la plus complète et la mieux ordonnée à cette date. Cette édition a été rapidement contrefaite (sans doute à Lyon ou Rouen) montrant ainsi le succès de cette correspondance.

On trouve un très grand nombre de lettres dans cette riche correspondance de Bussy-Rabutin. Exilé sur ses terres de Bourgogne à Bussy pendant près de dix-sept années à cause de son libertinage et surtout à cause de son Histoire amoureuse des Gaules (1665) qui circula en manuscrit et imprimée pendant toute la seconde moitié du XVIIe siècle, pour la plus grande fureur de Louis XIV qui ne lui pardonna jamais d’avoir chansonné les amours du Roi, Bussy-Rabutin se livre ici dans son intimité. Mais ce qu’il y a de plus remarquable sans aucun doute dans cette correspondance, c’est qu’on y trouve aussi les réponses des nombreux correspondants du comte, fait rare dans l’édition des correspondances anciennes qui sont parvenues jusqu'à nous. On y retrouve notamment la plus célèbre de ses correspondantes, la marquise de Sévigné, Marie de Rabutin Chantal. On sait que c’est le fils de Roger de Rabutin qui édita en partie avec le Père Bouhours la correspondance de Bussy (1697-1709 pour la première édition complète). C’est également le fils de Roger de Rabutin qui communiqua les manuscrits des premières lettres publiées de la marquise de Sévigné, quelques années plus tard.



Provenance : Ex libris ancien à l'encre : M. de Gontefrey (avec sa signature dans tous les volumes). La famille De Gontefrey semble originaire du Dauphiné (Grenoble et environs). 

Bel exemplaire en reliure d'époque très décorative.

Les beaux exemplaires de cette édition se trouvent très difficilement.

Prix : 1.450 euros

samedi 14 juin 2025

Gatien Courtilz de Sandras | Mémoires de Mr. d'Artagnan, Capitaine Lieutenant de la première Compagnie des Mousquetaires du Rois contenant quantité de choses particulières et secrettes qui se sont passées sous le Règne de Louis le Grand. A Cologne, chez Pierre Marteau, M. DCC. [1700]. 3 volumes in-12 cartonnage plein papier raciné à la bradel. Intéressant et rare exemplaire avec les trois volumes portant la date de 1700. Bel exemplaire.



COURTILZ DE SANDRAS (Gatien)

Mémoires de Mr. d'Artagnan, Capitaine Lieutenant de la première Compagnie des Mousquetaires du Roi contenant quantité de choses particulières et secrettes qui se sont passées sous le Règne de Louis le Grand.

A Cologne, chez Pierre Marteau, M. DCC. [1700] [Hollande]

3 volumes in-12 (159 x 95 mm | hauteur des marges : 152 mm) de (6)-44, (2)-497 et (2)-492 pages. Pages de titre à la sphère armillaire.

Reliure à la bradel cartonnée plein papier raciné, filets dorés aux dos, pièces de titres en cuir rouge, tranches rouges, doublures et gardes de papier blanc (reliures modernes à l'imitation des cartonnages du XIXe siècle). Reliures neuves parfaitement exécutées (les volumes avaient été reliés au début du XVIIIIe siècle mais la reliure était délabrée). Papier légèrement roussi. Une petite brûlure du papier qui est troué avec perte de quelques caractères. Légères taches et petites déchirures. Collationné complet.










Intéressant et rare exemplaire avec les trois volumes portant la date de 1700.

On sait que le premier volume seul a été publié sous la date de 1700 à Cologne chez Pierre Marteau. Ce premier volume a 564 pages et une table des matières. Il est imprimé "FIN" à la fin de ce premier volume. Nous avons pu comparer le premier tome de notre exemplaire daté 1701 avec ce premier volume daté 1700. Il s'avère que le tirage des deux volumes est identique en tous points à la coquille près. Seul la page de titre a été changée. On peut donc en conclure qu'il n'y a eu qu'un seul tirage de ce premier volume en 564 pages plus la table et que ce sont les volumes imprimés en 1700 dont seul le titre a été changé. Ce changement s'est opéré pour venir compléter les deux volumes qui ont suivi et portant eux aussi la date de 1701, eux aussi avec table et imprimés avec les mêmes caractères et employant les mêmes ornements. On peut considérer à juste titre cette série en 3 volumes portant la date de 1700 pour les 3 volumes comme étant une contrefaçon de la véritable première édition de ce texte (le premier volume ayant été en réalité imprimé en 1700, certainement à seulement quelques semaines d'intervalle avec les deux suivants).

Un exemplaire que nous avons eu en mains du premier volume en 564 pages et portant la date de 1700 était relié à l'époque avec les Mémoires de Chavagnac dans l'édition de 1700 également. Ce volume particulièrement intéressant, car il rassemble sous une élégante reliure hollandaise de l'époque le premier tome des Mémoires de d'Artagnan, daté de 1700 et comprenant 564 pages avec table des matières, et les Mémoires de Chavagnac, prouvait que ce premier volume des Mémoires de d'Artagnan publié en 1700 avait tout d'abord paru seul (sans les deux volumes qui suivront de près).

La complexité de cette chronologie éditoriale, dont tout est loin d'avoir été démêlé, laisse apparaître d'autres éditions parues sous la date de 1700 et 1701. Il existe ainsi également une édition en trois volumes tous datés de 1700, mais sans table des matières (cet exemplaire), ainsi qu'une autre où seul le premier volume, sans indication de tomaison, est daté de 1700 avec table, tandis que les deux suivants, datés de 1701, comportent aussi une table. L'édition en trois volumes datés de 1700 mais sans table aurait été réalisée ultérieurement, probablement en antidatant les tomes 2 et 3. Un autre tirage de 1700, avec un titre imprimé en noir, est également connu.








Le d’Artagnan historique, celui campé par Courtilz de Sandras et celui de Dumas qui s’en est inspiré ont quelques points communs : tous trois cadets de Gascogne, montant à Paris pour « prendre du service », devenant des mousquetaires courageux et fidèles. Charles Ogier de Batz naît vers 1612 à Castelmore près de Lupiac en Gascogne. Il entre vers 1633 dans la compagnie des mousquetaires, prend le nom de sa mère, d'Artagnan, et le titre de comte. En 1646, les mousquetaires sont licenciés et d’Artagnan entre au service de Mazarin parmi ses « gentilshommes ordinaires ». Sa fidélité au ministre et au roi pendant les troubles de la Fronde lui valent quelques missions délicates, qui révèlent son tact et son humanité, ainsi que des rétributions, comme la charge de capitaine des petits chiens du Roi courant le chevreuil… Lorsque les mousquetaires sont reconstitués, il devient lieutenant puis capitaine-lieutenant de la première compagnie en 1667. Maréchal de camp en 1672, il meurt au siège de Maastricht l’année suivante. (notice Musée de l'Armée).

Gatien Courtilz de Sandras (1644 -1712) suit une carrière militaire entre 1660 et 1679, passant notamment par les mousquetaires gris. Puis il se fait écrivain, rédigeant des mémoires apocryphes, notamment sur d'Artagnan, Mr de Rochefort, mais aussi des chroniques scandaleuses et des ouvrages politiques. Son œuvre reflète les ambitions et les frustrations de l’aristocratie encore féodale tenue en bride par l’Absolutisme. Sa liberté de ton le mènera d’ailleurs à la Bastille où il séjournera de 1693 à 1699. Dumas s’est largement inspiré de ces pseudo–mémoires pour écrire les Trois mousquetaires, Courtils lui fournissant les personnages d’Athos, de Porthos, d’Aramis ou de Milady et de nombreuses anecdotes. (notice Musée de l'Armée).

A propos du véritable d'Artagnan nous avons le témoignage de Madame de Sévigné qui écrit dans une lettre datée du 27 novembre 1664 adressée à M. de Pomponne : "[...] Il faut que je vous conte ce que j’ai fait. Imaginez-vous que des dames m’ont proposé d’aller dans une maison qui regarde droit dans l’Arsenal, pour voir revenir notre pauvre ami [Nicolas Fouquet]. J’étois masquée, je l’ai vu venir d’assez loin. M. d’Artagnan étoit auprès de lui ; cinquante mousquetaires derrière, à trente ou quarante pas. Il paroissoit assez rêveur. Pour moi, quand je l’ai aperçu, les jambes m’ont tremblé, et le cœur m’a battu si fort, que je n’en pouvois plus. En s’approchant de nous pour rentrer dans son trou, M. d’Artagnan l’a poussé, et lui a fait remarquer que nous étions là. Il nous a donc saluées, et a pris cette mine riante que vous connoissez. Je ne crois pas qu’il m’ait reconnue ; mais je vous avoue que j’ai été étrangement saisie, quand je l’ai vu rentrer dans cette petite porte. Si vous saviez combien on est malheureuse quand on a le cœur fait comme je l’ai, je suis assurée que vous auriez pitié de moi ; mais je pense que vous n’en êtes pas quitte à meilleur marché, de la manière dont je vous connois. [...]" ; puis encore dans une lettre du 11 décembre de la même année 1664 : "[...] Cependant M. Fouquet est allé dans la chambre de M. d’Artagnan : pendant qu’il y était, il a vu par la fenêtre passer M. d’Ormesson, qui venait de reprendre quelques papiers qui étaient entre ies mains de M. d’Artagnan. M. Fouquet l’a aperçu ; il l’a salué avec un visage ouvert, et plein de joie et de reconnaissance ; il lui a même crié qu’il était son très-humble serviteur. [...] À onze heures, il y avait un carrosse prêt, où M. Fouquet est entré avec quatre hommes, M. d’Artagnan à cheval avec cinquante mousquetaires. Il le conduira jusqu’à Pignerol, où il le laissera en prison sous la conduite d’un nommé Saint-Mars, qui est fort honnête homme, et qui prendra cinquante soldats pour le garder. D'après la chronologie avérée de d'Artagnan on sait que celui-ci apporta une lettre de Louis XIV au comte de Bussy Rabutin, cousin de ladite Madame de Sévigné et gouverneur du Nivernais, à la Charité sur Loire, à la date du 29 mars 1652.

C'est sur l'édition de 1704 des Mémoires de d'Artagnan qu'Alexandre Dumas père s'est penché pour rédiger ses Trois Mousquetaires (1844) et sa suite Vingt ans après (1845). "Lors d’un voyage à Marseille où son ami poète Joseph Méry réside, Dumas cherche quelque lecture, ne pouvant rester oisif. À la bibliothèque, on lui prête « Mémoires de M. d’Artagnan », une édition de 1704. Quelle ne fut sa fascination pour l’ouvrage ! Sur la route de Paris, Dumas ne lâche pas le livre d’une page, si bien que la bibliothèque de Marseille attend toujours qu’il le rapporte !".

Références : Jean Lombard, Courtilz de Sandras et la crise du roman à la fin du grand siècle, 1980 (PUF) ; Woodbridge, Gatien de Courtilz : Etude sur un précurseur du Roman réaliste France (Puf, 1925)

Bel exemplaire de cette édition primitive rare où les trois volumes portent la date de 1700.

Prix : 2.500 euros

ARGENSON (R. L. de Voyer de Paulmy, Marquis d') | Marquis d'Aligre (Etienne Jean François), pair de France (provenance) Considérations sur le Gouvernement ancien et présent de la France. A Amsterdam, chez Marc Michel Rey, 1765 [i.e. Paris ?] 1 volume in-8 relié plein veau à l'époque. Bel exemplaire provenant de la bibliothèque d'Étienne Jean François d'Aligre (1770-1847) avec son ex libris gravé armorié, fils d'Etienne François d'Aligre (1727-1798), premier Président du Parlement de Paris.



ARGENSON (R. L. de Voyer de Paulmy, Marquis d') | Marquis d'Aligre (Etienne Jean François), pair de France (provenance)

Considérations sur le Gouvernement ancien et présent de la France.

A Amsterdam, chez Marc Michel Rey, 1765 [i.e. Paris ?]

1 volume in-8 (19,5 x 12,8 cm) de XVI-328 pages. Page de titre imprimée en rouge et noir avec une jolie vignette gravée à l'eau-forte.

Reliure strictement de l'époque plein veau caramel décoré à l'acide, dos lisse orné, roulette dorée en encadrement des plats, filet doré sur les coupes, doublures et gardes de papier peigne, tranches dorées.








Nouvelle édition.

La première édition a paru chez le même éditeur Marc-Michel Rey en 1764. Au moins trois éditions ont paru entre 1764 et 1765. Néanmoins plusieurs éditions ont paru à la même époque à Paris, soit chez la Veuve Duchesne, soit chez Barrois, soit sous la fausse adresse de Marc-Michel Rey. Notre exemplaire est orné d'une vignette qui n'est pas la marque habituelle de Marc-Michel Rey ; de même la signature par cahiers "à la française" laisse supposer une impression clandestine parisienne plutôt qu'une production hollandaise.

Ouvrage majeur de la pensée politique du XVIIIe siècle, ces Considérations rédigées entre 1734 et 1755 mais publiées seulement en 1764, un an après la mort de leur auteur, offrent une critique lucide et audacieuse de l’absolutisme monarchique en France. Le marquis d’Argenson, ministre sous Louis XV, y développe une réflexion approfondie sur les institutions françaises, en les confrontant aux modèles antiques et étrangers, et surtout en appelant de ses vœux une réforme en profondeur de l'État fondée sur la participation du peuple, la décentralisation et la justice sociale. Prônant une monarchie tempérée et une noblesse au service du bien commun, il se fait le précurseur des Lumières réformatrices et de certaines idées qui trouveront un écho sous la Révolution. L’ouvrage séduit par son ton libre, ses formules vigoureuses et son regard pénétrant sur les rouages de l’administration royale. Il dénonce les abus de la centralisation, l’inefficacité de la justice, l’ignorance du peuple, tout en proposant des solutions concrètes telles que des assemblées provinciales, une plus juste répartition de l’impôt, ou une éducation plus largement répandue. Véritable laboratoire intellectuel de la réforme politique à la veille des bouleversements de 1789, ces Considérations restent un témoignage capital de la pensée réformatrice d’un aristocrate éclairé.

"En matière sociale et politique les idées de d'Argenson sont à la fois hardies, brutales et timorées.... (il) tend vers une sorte de socialisme imposé et surveillé par une aristocratie qui n'en prendrait que ce qu'elle voudrait" (Mornet, Origines intellectuelles de la Révolution Française).








C’est une prévention presque générale en France depuis le Ministère du Cardinal de Richelieu, que la gloire & la force de l’autorité Royale résident dans la dépendance servile des Sujets : on se propose de prouver le contraire dans ce Traité, & d’établir quelles étaient les imperfections du Gouvernement Féodal ; on examinera à cet effet les différents Gouvernements des souverainetés de l’Europe ; & on montrera par cet examen que l’administration populaire sous l’autorité du Souverain, ne diminue point la puissance publique, qu’elle l’augmente même & qu’elle ferait la source du bonheur des Peuples. Ces vérités exposées, on proposera quelques principes pour assurer le repos au dehors comme au dedans de l’État. (Avertissement)

Il y a déjà plusieurs années qu’il s’est répandu des copies manuscrites de cet ouvrage, & il a mérité les éloges de tous ceux qui l’ont lu. Mr. Rousseau qui en parle dans diverses notes du Contrat Social, parait en faire beaucoup de cas. Le Libraire en cherchait une copie, lorsque se trouvant à Genève en Juillet 1763, Mr. Gab. Cramer Libraire de cette ville, lui en montra une qu’on lui avait envoyée pour l’imprimer. Mais des raisons particulières l’en ayant empêché, il en fit présent à son confrère qui saisit l’occasion présente de faire connaître sa générosité, & de lui en témoigner publiquement sa reconnaissance. On a donc cru faire plaisir au public en imprimant cet ouvrage & certainement il ne pouvait paraître dans des circonstances plus propres à en rendre la lecture intéressante. Malheureusement la copie qu’on a entre les mains s’est trouvée pleine de fautes. Ce n’est qu’en revoyant les dernières épreuves de la neuvième & de la dixième feuille qu’on s’en est aperçu. On a d’abord suspendu l’impression & l’on n’a rien négligé pour se procurer une copie plus correcte. Tous les soins qu’on s’est donnés pour cela ayant été inutiles, on a été obligé de passer outre ; Mais on a revu avec la plus grande attention les dernières feuilles, & à l’exception de deux ou trois endroits qu’on n’entendait pas & auxquels l’on n’a pas osé toucher, de peur de faire dire à l’auteur ce qu’il n’avait pas pensé, l’on se flatte de n’y avoir laissé aucune faute considérable. On a suppléé par un Errata à celles qui sont restées dans les huit premières feuilles. Le Libraire qui n’a rien épargné jusqu’ici pour donner des éditions exactes, espère que l’impossibilité où il a été de faire mieux excusera les imperfections de celle-ci, & qu’elles ne nuiront point au succès d’un Ouvrage aussi estimable. (Avis du libraire)

Provenance : de la bibliothèque d'Étienne Jean François d'Aligre (1770-1847) avec son ex libris gravé armorié, fils d'Etienne François d'Aligre (1727-1798), premier Président du Parlement de Paris. Ce volume a très probablement tout d'abord appartenu à la bibliothèque Etienne François. Les d'Aligre sont une illustre famille de magistrats. Etienne François d'Aligre amassa une fortune considérable. Selon M. Provost dans le dictionnaire biographique de Roman d'Amat : « Il avait, disait-on, cinq millions de capitaux dans la banque à Londres et disposait de 700 000 livres de revenu ; les présidents étant associés à toutes les affaires comportant des épices, il aurait touché, en dix-sept ans, des vacations représentant quatre cents années de travail. » Il consacra une partie importante de sa fortune à restaurer son château de Baronville, dans l'actuelle Eure-et-Loir, et à en reconstituer les anciens jardins. Son fils ne fut pas moins fortuné. A la mort de son père il entra en possession de l'immense héritage que l'extrême parcimonie de ses père et mère lui avait laissé, et, lors de l'avènement de Napoléon Ier, accepta les fonctions de chambellan auprès de la princesse Pauline Bonaparte, épouse du général Leclerc puis du Prince Borghese. Il avait été, l'année d'avant, nommé membre du conseil général du département de la Seine. Toutefois, il ne consentit jamais, malgré les plus vives instances de l'Empereur, à donner sa fille en mariage au général Arrighi, parent de Napoléon. Deux fois président du collège électoral d'Eure-et-Loir, le marquis fut un des commissaires chargés de recevoir Louis XVIII à son entrée dans Paris (1814). La Restauration l'appela, le 17 août 1815, à la dignité de pair de France. Il inaugura sa pairie à l'occasion du procès du maréchal Ney : à l'appel nominal qui eut, lieu, dans la séance du 6 décembre, sur l'application de la peine, d'Aligre fut le premier des cinq membres qui s'abstinrent de prendre part au vote. Pendant toute la durée de la Restauration, partisan dévoué de la monarchie constitutionnelle, il n'accorda son suffrage à aucune des mesures réclamées par le ministère de M. de Villèle ; aussi, après les journées de Juillet 1830, fut-il du nombre des pairs que le gouvernement de Louis-Philippe Ier conserva dans la Chambre haute. Il y siégea jusqu'à sa mort. Sa fortune était immense. Il possédait 21 000 hectares de terre jusque dans la région de Bordeaux. Ce fut lui qui acheta le château des Vaux en l'an 1804. Il eut une fille unique. Armes du marquis d'Aligre, pair de France : Burelé d'or et d'azur (de dix pièces), au chef du second, chargé de trois soleils du premier. Cette famille possédait une très riche bibliothèque qui a été dispersée depuis.

Bel exemplaire de provenance intéressante.

Prix : 950 euros

vendredi 13 juin 2025

Edmond ROSTAND | Cyrano de Bergerac. Drame en cinq actes. Illustré par MM. Besnard, Flameng, Albert Laurens, Léandre,; Adrien Moreau, Thévenot. Gravé par Romagnol. Paris, Armand Magnier, éditeur, 1899. 1 fort volume in-4 (29 x 20,5 cm) relié à la bradel plein papier marbré. Un des 400 exemplaires sur papier vélin de cuve avec deux états des bois. Très bel exemplaire.



Edmond ROSTAND

Cyrano de Bergerac. Drame en cinq actes. Illustré par MM. Besnard, Flameng, Albert Laurens, Léandre,; Adrien Moreau, Thévenot. Gravé par Romagnol.

Paris, Armand Magnier, éditeur, 1899

1 fort volume in-4 (29 x 20,5 cm) de 299 pages. Avec 55 compositions, dont la couverture, une vignette de titre, le portrait hors texte, une vignette de dédicace, 5 vignettes, une pour chaque acte, 5 planches hors texte (ici en 3 états, sur vélin, sur chine et en couleurs chromolithographiées sur papier couché) et 41 compositions dans ou autour du texte. L’édition est illustrée par plusieurs artistes, chacun s’étant chargé d’un acte. Ainsi la couverture et le portrait sont dus à François Thévenot, le premier acte à Adrien Moreau, le second à Charles Léandre, le troisième à Albert Laurens, le quatrième à François Flameng et le dernier à Albert Besnard. Toutes ces illustrations ont été gravées sur bois par Romagnol.

Reliure à la bradel plein papier marbré "yeux de chats", pièce de titre en cuir noir au dos. Reliure neuve. Petite tache rousse sur la tranche (à quelques feuillets seulement). Intérieur d'une fraîcheur remarquable.














Première édition illustrée.

Tirage à 500 exemplaires.

Celui-ci, un des 400 exemplaires sur papier vélin de cuve avec deux états des bois dont un état avant la lettre tiré à part sur papier de chine. Dans notre exemplaire chaque état sur chine a été intercalé dans le texte à sa place.

Un amateur de l'époque a intercalé une page manuscrite sur Montfleury et un petit billet sur la tirage des nez.

Première édition illustrée de Cyrano de Bergerac du chef-d’œuvre absolu du théâtre français moderne. Publiée un an seulement après l'édition originale (Charpentier et Fasquelle, 1898). Somptueusement mise en images par six des plus grands illustrateurs de la Belle Époque : Thévenot (portrait et titre), Moreau, Léandre, Laurens, Flameng et Besnard, et gravée sur bois par A. Romagnol. Cette édition constitue la plus prestigieuse illustration du drame héroïco-romantique d’Edmond Rostand, créé en 1897 avec un succès foudroyant. En ressuscitant le théâtre en vers dans une époque dominée par le naturalisme, Rostand signe avec Cyrano un hommage vibrant au panache, à l’amour sacrificiel, à la verve poétique et à l’idéal chevaleresque. Le personnage de Cyrano, à la fois bretteur, poète, philosophe et amant éconduit, s’est imposé comme l’un des mythes fondateurs de l’imaginaire littéraire français. Le personnage de Cyrano de Bergerac imaginé par Edmond Rostand s’inspire librement d’un homme bien réel : Savinien de Cyrano de Bergerac (1619–1655), écrivain libertin, bretteur redouté, philosophe hardi et précurseur de la science-fiction avec ses récits L’Histoire comique des États et Empires de la Lune et du Soleil. Si le Cyrano historique était déjà célèbre pour son esprit caustique, son anticonformisme et son nez proéminent, libertin assumé de son temps, c’est Rostand qui l’a transformé en figure mythique du panache à la française, poète amoureux et héros tragique. Le dramaturge a magnifié ce personnage singulier en lui prêtant un amour idéalisé pour sa cousine Roxane, un génie verbal flamboyant et une grandeur d’âme héroïque, créant ainsi un pont entre l’érudition baroque du XVIIe siècle et l’élan romantique de la fin du XIXe. Par cette réinvention théâtrale, Cyrano devient plus qu’un homme : il incarne une légende littéraire où l’histoire se mêle à la fiction, faisant du véritable Cyrano un mythe immortel de la culture française. Depuis sa création triomphale à la Porte-Saint-Martin en 1897 avec Coquelin aîné dans le rôle-titre, Cyrano de Bergerac n’a cessé d’être joué, adapté, réinventé sur toutes les scènes du monde, devenant l’une des pièces les plus représentées du répertoire théâtral français. Traduit dans des dizaines de langues, le drame de Rostand a connu d’innombrables mises en scène, tantôt fastueuses et lyriques, tantôt dépouillées et contemporaines, portées par les plus grands comédiens : Pierre Fresnay, Daniel Sorano, Jean Piat, Gérard Depardieu, ou plus récemment Philippe Torreton et Edmond Van Daële. Le cinéma s’est aussi emparé très tôt de cette figure héroïque et mélancolique, depuis les premières adaptations muettes jusqu’à des chefs-d’œuvre modernes tels que le film de Jean-Paul Rappeneau en 1990, avec Gérard Depardieu dans un rôle qui lui valut une reconnaissance internationale. Plus récemment encore, le personnage a inspiré des relectures audacieuses, notamment la comédie musicale de Broadway Cyrano avec Peter Dinklage (2021), preuve de la vitalité inépuisable d’un texte qui conjugue avec grâce la flamboyance du verbe, le lyrisme amoureux et la noblesse du sacrifice.

Très bel exemplaire de ce grand classique ici en première édition illustrée.

Prix : 1.650 euros