lundi 28 avril 2025

Arthur RIMBAUD | Pierre THOMAS (illustrateur) | Pierre FANLAC (éditeur). Les illuminations. Poèmes en Prose. 12 Compositions en couleurs de Pierre Thomas. Pierre Fanlac, éditeur (imprimé sur les presses de l'imprimerie commerciale à Périgueux), 1944. 1 volume in-8 (24 x 16,5 cm) broché. Tirage unique à 130 exemplaires. Bel exemplaire.



Arthur RIMBAUD | Pierre THOMAS (illustrateur) | Pierre FANLAC (éditeur)

Les illuminations. Poèmes en Prose. Compositions en couleurs de Pierre Thomas.

Pierre Fanlac, éditeur (imprimé sur les presses de l'imprimerie commerciale à Périgueux), 1944

1 volume in-8 (24 x 16,5 cm) broché de 85 pages. Avec 12 compositions au trait rehaussées au pinceau à l'aquarelle par l'artiste Pierre Thomas (chaque composition est signée par l'artiste) dont 2 hors-texte et 8 dans le texte et une en couverture et une en regard du titre. Couverture à rabats avec titre imprimé en vert sur le premier plat et au dos. Belle typographie en noir et vert (titres courants). Excellent état de conservation.

Tirage unique à 130 exemplaires (plus quelques exemplaires hors commerce).

Celui-ci, un des 100 exemplaires sur Montgolfier (n°62).

Il a été tiré en outre un exemplaire unique sur Annam avec les projets des illustrations, 3 exemplaires sur parchemin d'Annam et 26 exemplaires sur vélin de Vidalon.



La célébrité des Illuminations de Rimbaud est aujourd'hui une évidence. Écrit entre 1872 et 1875, Illuminations est un recueil posthume d’un point de vue éditorial : Rimbaud, retiré de la littérature à vingt ans, n’en a jamais organisé la publication. C’est Paul Verlaine qui en établit la première édition en 1886, à partir de manuscrits confiés à divers amis. Le titre même est probablement une invention de Verlaine. Ces poèmes en prose et en vers libres, éclatés et visionnaires, marquent une rupture décisive avec les formes traditionnelles. Rimbaud y invente une langue neuve, où s’entremêlent visions hallucinées, modernité urbaine, exotisme et quête mystique. Toutefois, la valeur littéraire de ce recueil a été discutée : Jacques Rivière ou Henri Mondor ont souligné son caractère fragmentaire et parfois hermétique, s'interrogeant sur l’achèvement réel du projet. Malgré ces réserves, Illuminations fut une source d’inspiration majeure pour les surréalistes : André Breton saluait en Rimbaud un "voyant" précurseur, pionnier de la libération de l’imaginaire et du langage. Ce recueil éclaire ainsi autant la fin de la poésie classique que les audaces du XXᵉ siècle. Arthur Rimbaud génie littéraire exalté ou bien adolescent fumiste patenté ? Chacun se fera son idée en fonction de sa sensibilité. Peut-être un adolescent génial exalté ?



"Sur la pente du talus, les anges tournent leurs robes de laine, dans les herbages d’acier et d’émeraude. Des prés de flammes bondissent jusqu’au sommet du mamelon. À gauche, le terreau de l’arête est piétiné par tous les homicides et toutes les batailles, et tous les bruits désastreux filent leur courbe. Derrière l’arête de droite, la ligne des orients, des progrès. Et, tandis que la bande, en haut du tableau, est formée de la rumeur tournante et bondissante des conques des mers et des nuits humaines, La douceur fleurie des étoiles, et du ciel, et du reste descend en face du talus, comme un panier, contre notre face, et fait l’abîme fleurant et bleu là-dessous." (Mystique, extrait des Illuminations)














Pierre Thomas, artiste illustrateur de ce volume, n'a pas laissé de trace dans l'histoire de l'art au XXe siècle. Nous retrouvons cependant son nom associé à l'éditeur Pierre Fanlac et à la région du Périgord. Il illustra chez le même éditeur Une saison en enfer du même Arthur Rimbaud mais également plusieurs ouvrages directement liés au Périgord. Nous en déduisons que Pierre Thomas était de cette région et un ami proche de Pierre Fanlac.

Beau livre illustré dont le tirage faible et les illustrations originales au pinceau en font une très belle pièce de collection pour les rimbaldiens.

Bel exemplaire.

Prix : 1.500 euros

jeudi 24 avril 2025

Jacques DE CHAVAILLE | Observations morales et politiques en forme de maximes, sur les vies des hommes illustres. Dédiées à Monseigneur Séguier, Chancelier de France. Par le Sieur de Chavaille, lieutenant général d'Uzarche en Limousin. Livre second. Imprimé à Paris par Denys Langlois, 1648. 1 volume in-8. Reliure strictement de l'époque plein maroquin rouge. Superbe exemplaire parfaitement conservé en maroquin ancien de ce livre rare.



Jacques DE CHAVAILLE

Observations morales et politiques en forme de maximes, sur les vies des hommes illustres. Dédiées à Monseigneur Séguier, Chancelier de France. Par le Sieur de Chavaille, lieutenant général d'Uzarche en Limousin. Livre second.

Imprimé à Paris par Denys Langlois, 1648

1 volume in-8 (18 x 11,3 cm) de 15 feuillets non chiffrés comprenant le titre, le portrait du chancelier Séguier imprimé au verso du titre, l'épître à Monseigneur Séguier, l'avis de l'imprimeur au lecteur, la table des maximes, trois poésies ; 243-(5) pages.

Reliure strictement de l'époque plein maroquin rouge, dos à nerfs orné aux petits fers dorés, titre doré, plats encadrés d'un triple filet doré et d'un encadrement improprement dit "à la Du Seuil" avec fers pointillés dans les angles, roulette dorée sur les coupes, doublures de papier peigne, gardes de papier blanc, tranches dorées. Reliure d'une fraîcheur étonnante. Exemplaire sans le frontispice gravé par N. Picart. Exemplaire réglé à l'encre rouge, très frais.

Edition originale rare.





Jacques de Chavaille (1592-1670) a publié successivement trois volumes d' "Observations morales et politiques" appliquées à la vie des hommes de l'antiquité pour l'usage des hommes de son temps. Un premier volume a paru en 1641, un second volume a paru en 1648 (notre volume), et enfin un troisième volume a paru sous cette même date de 1648 un peu plus tard et chez un autre libraire que les deux premiers. Ce dernier volume est extrêmement rare. Les trois volumes ensemble, pas plus que les deux premiers, ne se trouvent ensemble la plupart du temps. Chaque volume est donc un ouvrage complet en lui-même ce qui explique que notre volume est titré sans tomaison, comme un ouvrage complet.

Ce Livre Second contient les Observations Morales et Politiques sur les vies d'Antonius (Marc-Antoine), Artoxercès (Artaxerxés), Dion (de Syracuse), Brutus, Aratus (Aratos de Soles), Galba et Othon. L'auteur en tire des maximes telles que celles-ci : La débauche corrompt la jeunesse. Les sujets doivent secours au prince. L'ivrognerie gâte le corps et l'esprit. Un prince doit prendre garde aux actions de ses favoris. La volupté va contre le devoir. Le libertinage des soldats fait échapper la victoire. Le peuple est toujours dans la méconnaissance. Un homme habile doit pourvoir à l'avenir. Un ami se connait au besoin. Etc.









Dans les Curiosités de la Bibliographie Limousine on lit à son propos : "Jacques de Chavaille, magistrat, écrivain moraliste du XVIIe siècle. Né à Uzerche (Bas-Limousin) en 1592, mort dans cette ville le 22 janvier 1670. Il est plus connu pour ses mésaventures que par ses écrits. Jacques de Chavaille était fils de Pierre de Chavaille, sieur de Faugeras et du Pouget, lieutenant-général de la sénéchaussée d’Uzerche et de Martiale du Pouget. Pierre de Chavaille avait été député du Tiers aux États Généraux de 1588 : il reçut la même délégation pour les États de 1614, mais à raison de son grand âge et pour le cas où il ne pourrait vaquer, les électeurs nommèrent en même temps son fils, encore mineur de 25 ans. En effet, le père mourut avant la réunion des États et son fils lui succéda à la fois comme lieutenant-général et comme député. Le jeune suppléant ne fut pas admis à siéger sans difficultés. Mais un jour, à l’issue d’une séance, il fut injurié et roué de coups de bâton par le seigneur Henri de Bonneval, dit « la Grand-Barbe », son collègue de la Noblesse et son voisin du château de Blanchefort. Cette agression, sans motif connu, causa un grand émoi. Sur la plainte portée aux pieds du roi, par l’assemblée du Tiers, Henri de Bonneval fut condamné à mort par le Parlement et exécuté par effigie, le 16 mars 1615, en place de Grève, ce qui ne l’empêcha pas de mourir dans son lit, non sans avoir de nouveau molesté sa victime et les habitants d’Uzerche qui avaient pris le parti de leur député et lieutenant-général. En outre de ces brutalités, Jacques de Chavaille paraît avoir eu une existence assez tourmentée. Pour ne citer que le fait le plus saillant, ce lieutenant-général fut mis en prison en 1640. C’est là qu’il prépara son premier ouvrage. Dans la dédicace qu’il en fit au cardinal de Richelieu, en 1641, il lui disait : « C’est un enfant de larmes que je vous offre… et d’un père qui n’est connu que par ses infortunes. La captivité l’a conçu, mais la liberté le fait naître et comme elle vient de vous plus que de tout autre il est juste qu’il vous soit voué de préférence. » Et dans l’avis de l’imprimeur au lecteur, rédigé sans doute par Chavaille lui-même, il est encore déclaré que l’auteur du livre « bien que d’une probité reconnue et d’une intégrité parfaite, n’a jamais goûté que des déplaisirs et des afflictions ». Nous ignorons si le lieutenant-général s’était compromis dans la politique, alors très troublée par les intrigues des princes ou s’il avait exposé sa responsabilité dans quelque acte de ses fonctions ou de la vie civile. Les décrets de prise de corps étaient jadis délivrés plus légèrement que ne le sont aujourd’hui les mandats d’arrêt. Un président de tribunal (c’était à peu de chose près la fonction de Chavaille) enlevé à son siège pour être écroué à la Conciergerie du Palais et revenant bientôt reprendre la tête de sa compagnie, cela n’est point si extraordinaire au XVIIe siècle ! La considération du président d’Uzerche ne semble pas avoir souffert de cet accroc. Un de ses fils fut conseiller au Parlement de Bordeaux et tous ses enfants firent de brillantes alliances dans la noblesse. [...] Chavaille a été loué en vers et en prose par ses contemporains. L’un d’eux le qualifie d’« homme d’un sublime génie et d’une haute piété ». Cette dernière qualité peut lui être concédée. Un autre de ses amis nous présente son talent comme un raccourci de celui de Plutarque et qui pourrait le remplacer. Pour nous, c’est un honnête lettré de province, d’esprit cultivé, de jugement bien équilibré, écrivant avec facilité et correction. Ce qu’il y a de personnel et de plus recommandable dans son œuvre, c’est le dessein « de rendre utiles les vies des hommes illustres », de tirer de leurs actions un enseignement pratique et de déduire de l’exemple une règle de conduite, sous forme de maxime, pour les diverses occurrences de la vie. Les trois volumes de Chavaille peuvent encore être feuilletés sans ennui et avec profit." (pp. 59-61, Curiosités de la Bibliographie Limousine, Limoges, 1905).

Il semble avéré que les trois volumes d'Observations morales et politiques soient tous fort rares et qu'ils se trouvent toujours séparément. Sans doute ont-ils été imprimés à très petit nombre.






Provenance : de la bibliothèque d'André Eveillé (1835-1900), homme de loi, né à Saintes et décédé à Chermignac. Il fut contrôleur des contributions directes à Angoulême, Luçon, Sables d'Olonne, Libourne, Bordeaux. Inspecteur des impôts à Tarbes puis Bordeaux 1862. Malade il se fixe à Charmignac en 1897. Bibliophile et linguiste il a écrit un "Glossaire saintongeois".

Superbe exemplaire parfaitement conservé en maroquin ancien de ce livre rare.

Prix : 2.500 euros

mercredi 23 avril 2025

Yves GANDON | Sylvain SAUVAGE, illustrateur. Le Pavillon des Délices regrettées, traduit du chinois. Illustrations de Sylvain Sauvage. Marcel Lubineau, éditeur, Paris, s.d. (1946). Un des 40 exemplaires de tête sur vélin d'Arches avec suite en noir et dessin original à l'encre de Chine. Bel exemplaire.



Yves GANDON | Sylvain SAUVAGE, illustrateur

Le Pavillon des Délices regrettées, traduit du chinois. Illustrations de Sylvain Sauvage.

Marcel Lubineau, éditeur, Paris, s.d. (1946)

1 volume petit in-8 (18,5 x 10,8 cm), en feuilles de  162-(1) pages. Illustrations en couleurs dans le texte. Couverture rempliée imprimée noir et or sur le premier plat. Emboîtage carton éditeur. Très bon état. Légères décharges en regard des bois en couleurs.

Edition originale sous cette forme.

Premier tirage des très belles illustrations de Sylvain Sauvage.








Volume achevé d'imprimer le 25 septembre 1946 par Pierre Bouchet qui a gravé sur bois les illustrations avec la collaboration de Gilbert Poilliot.

Le Tirage a été limité à 40 exemplaires sur vélin d'Arches, numérotés de 1 à 40, auxquels on a joint un dessin original et une suite en noir des gravures, et 950 exemplaires sur vélin de Lana.

Celui-ci, un des 40 exemplaires de tête sur vélin d'Arches avec suite en noir et dessin original à l'encre de Chine.

La suite en bistre se compose de 35 planches qui contiennent les grandes vignettes et les culs-de-lampe en guise de remarque.

L'illustration se compose d'une fleur de cerisier sur la page de titre, 35 vignettes d'en-tête en couleurs dans le texte et 31 culs-de-lampe. Le tirage des bois en couleurs est superbe, parfois des couleurs vives alternent avec des tons pastels ou noir et or. Plusieurs vignettes sont d'une sensualité délicate en rapport avec le texte.









Gandon "traduit" pour la première fois Le Pavillon des Délices regrettées qui paraissent anonymement chez Jacques Haumont en 1942. Mais ce livre entre dans la catégorie des supercheries littéraires.

Dans une nouvelle édition de 1947, Gandon avouait la paternité pleine et entière de ce pastiche de littérature chinoise : "J'ai été Tsing Pann Yang, poète chinois, écrit-il dans son Avertissement, je ne joue pas sur les mots, et il me chagrinerait qu'on levât ici les épaules." Gandon relate ensuite les circonstances de la rédaction de ces textes. C'est chez une amie opiomane qu'un soir, Gandon rencontra une jeune femme "arrivée de Saïgon, huit jours plus tôt [...]. Elle habitait la colonie depuis son mariage, qui remontait à cinq and." Malheureuse en ménage, la jeune Oriane avait néanmoins obtenu de son époux l'autorisation de "revenir en France, où elle comptait passer un an à se remettre de l'anémiant climat chinchinois" ... en s'adonnant aux "ténébreuses délices" de l'opium. Sans doute grisé lui-même par les émanations de la drogue, l'invité se prit à voir dans les "yeux en amandes" de cette étrange fumeuse, "avec une inexprimable émotion, se composer une scène toute pareille à celle que je vivais dans l'instant, mais dont les héros différaient d'Oriane et de moi-même. C'était un jeune homme et une jeune femme de l'Empire du Milieu. Ils s'aimaient, il se disaient leur amour, et, tout à coup, j'entendis leurs paroles, et, par un phénomène que je ne chercherai pas à expliquer, je fus celui qui parlais dans la pupille d'Oriane, comme si, à travers l'espace et le temps aboli, j'avais miraculeusement changé d'enveloppe corporelle. J'étais Tsing Pann Yang ; celle qui palpitait contre moi était Perle Limpide. [...] Et l'extraordinaire aventure se poursuivit. Quelques heures plus tard, je traduisis de l'original chinois, c'est à dire de mon propre texte, écrit dans une autre vie. [...]" (in Supercheries littéraires : La vie et l'œuvre des auteurs supposés, etc., Droz éditeur, de Jean-François Jeandillou, pp. 200-203).











L'illustration de Sylvain Sauvage est en parfaite adéquation avec ce texte sensuel et traversé par les douces effluves esthétiques asiatiques.

Bel exemplaire du tirage de tête avec suite et dessin original.

Prix : 950 euros